Le paysage mondial de l’IA évolue rapidement, avec des tendances distinctes émergeant dans différents domaines. Alors que les États-Unis conservent une nette avance dans le développement de modèles d’intelligence artificielle à grande échelle, l’Europe gagne du terrain dans la création d’applications innovantes basées sur ces modèles.
Cette image nuancée ressort du rapport Globalscape 2025 d’Accel, qui examine le marché en plein essor de l’IA et du cloud. Accel, une société de capital-risque qui investit à la fois dans les startups européennes Lovable (une plateforme de « vibe-coding ») et Synthesia (un outil de création vidéo d’entreprise alimenté par l’IA), souligne ce changement dans son analyse.
Les entreprises européennes et israéliennes développant des applications cloud et d’IA ont obtenu 66 cents pour chaque dollar levé par leurs homologues américaines jusqu’à présent en 2023. Cela représente une augmentation spectaculaire par rapport à il y a dix ans, lorsque le financement européen était nettement inférieur à celui des États-Unis.
Philippe Botteri, partenaire d’Accel, attribue cet essor à l’écosystème florissant de fondateurs et d’investisseurs férus de technologie en Europe. Au cours des dix dernières années, ils ont cultivé un environnement solide pour bâtir des sociétés de logiciels prospères, créant ainsi une boucle de rétroaction positive qui stimule davantage l’innovation.
Jonathan Userovici, associé commandité de la société de capital-risque Headline basée à Paris, fait écho à l’observation de Botteri. Il souligne que les entrepreneurs européens et israéliens ne contribuent pas seulement au vivier de talents des grands laboratoires technologiques d’IA ; ils tracent également leur propre voie en créant des startups de pointe dans divers secteurs tels que la santé, les services juridiques, la fabrication et le marketing.
Le rapport « AI Europe 100 » de Headline soutient également cette tendance, identifiant les startups prometteuses d’applications natives d’IA en Europe avec le potentiel de devenir des leaders du secteur en raison de leur croissance rapide, de leurs équipes solides et de leur technologie avancée.
L’un des principaux différenciateurs de cette vague d’IA par rapport aux précédentes est le rythme de croissance accéléré. Ces nouvelles applications natives d’IA génèrent 100 millions de dollars de revenus annuels récurrents en quelques années – un exploit qui prenait traditionnellement des décennies aux éditeurs de logiciels.
Botteri souligne leur efficacité exceptionnelle, notant que le revenu par employé atteint un niveau sans précédent pour les éditeurs de logiciels à l’échelle mondiale. Tout en reconnaissant ce changement dynamique, il souligne que les géants existants du logiciel cloud ne sont pas en train de disparaître. Ils intègrent activement les capacités de l’IA dans leurs produits, brouillant ainsi les frontières entre les offres traditionnelles et celles basées sur l’IA.
Doctolib, une société du portefeuille d’Accel, illustre cette intégration en incorporant l’IA si profondément qu’elle peut être considérée comme une entreprise native de l’IA, même si elle n’a pas été initialement conçue comme telle.
Malgré les progrès réalisés en Europe en matière d’applications, il y a moins de concurrents locaux en concurrence avec les grands modèles de fondations comme ceux développés aux États-Unis. Même si Botteri n’exclut pas complètement de futures percées de la part de petites entreprises modèles européennes, il suggère que ce domaine pourrait ne pas être mûr pour des perturbations majeures à l’heure actuelle.
Cependant, une concurrence féroce se déroule pour les opportunités d’investissement dans la couche applicative de l’IA, malgré des questions persistantes sur la défendabilité du marché. Accel maintient que la création d’offres centrées sur les produits et adoptées rapidement présente encore un potentiel de défense important.
Lotan Levkowitz, associé directeur de la société israélienne de capital-risque Grove Ventures, met en avant un autre domaine souvent négligé : les données. Il affirme que les entreprises spécialisées dans les données propriétaires et créant des « volants d’inertie » de données durables représentent une opportunité d’investissement intéressante, car cet aspect de l’IA est actuellement sous-évalué.
Essentiellement, la course mondiale à l’IA a pris une forme à multiples facettes. Alors que les grands modèles restent fermement dans la sphère d’influence américaine, l’Europe trace sa propre voie en excellant dans la couche applicative et en élaborant des solutions innovantes dans divers secteurs. Ce paysage dynamique souligne la nature distribuée du développement de l’IA, différentes régions apportant des atouts uniques et façonnant l’avenir de cette technologie transformatrice.






























